Abattement sur les moins-values mobilières

Condamnation par le Conseil d’Etat de la doctrine fiscale.

Le Conseil d’état, dans le cadre d’un arrêt du 12 novembre 2015, suite à un recours pour excès de pouvoir, vient de condamner la doctrine fiscale qui prévoit, en matière de plus-values mobilières, que l’abattement pour durée de détention codifié aux articles  150-0 D 1 du CGI s’applique également aux moins-values.

Petit rappel : le régime d’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux des particuliers a été modifié par l’article 17 de la loi de finances 2014. Rappelons que depuis 2013, les plus-values réalisées à l’occasion de la cession de valeurs mobilières sont assujetties au barème progressif de l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au taux de 15,5 % et le cas échéant, à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (de 3 à 4 %). Le nouveau régime prévoyait, pour l’impôt sur le revenu exclusivement, que la plus-value imposable pouvait être réduite d’un abattement pour durée de détention de 50 % en cas de conservation entre 2 et 8 ans, et de 65 % au-delà de 8 ans. Un abattement majoré étant prévu dans un  certain nombre de situations et s’étageant de la façon suivante :

  • 50 % en cas de détention comprise entre 1 et 4 ans,
  • 65 % entre 4 et 8 ans,
  • et 85 % au-delà de 8 ans.

Cet abattement majoré concerne essentiellement les cas suivants :

  • cession par un dirigeant d’une PME faisant valoir ses droits à la retraite,
  • cession d’une PME de moins de 10 ans,
  • cession intrafamiliale.

En application de ce régime, les commentaires administratifs avaient conclu de la réforme que le montant de la plus-value de cession ainsi que celui de la moins-value de cession était réduit de l’abattement pour durée de détention (BOI-RPPM-PVBMI-20-20-20-10-20150320). Cette interprétation  de la doctrine fiscale conduisait à minorer les moins-values imputables dès lors que les titres étaient détenus depuis plus de 2 ans, et conduisait au paradoxe suivant : Il était plus favorable de vendre très rapidement des titres en moins-value que de les conserver en attendant une éventuelle remontée.

Le Conseil d’Etat vient de juger que les instructions fiscales contestées devaient être rapportées car elles ne se contentaient pas d’expliciter la loi mais y ajoutaient des dispositions nouvelles. Rappelons que la doctrine fiscale est là pour commenter, et non pas pour ajouter de nouvelles dispositions au texte lui-même.

En conclusion, il s’agit d’une excellente nouvelle pour les contribuables puisqu’aujourd’hui, la méthode utilisée pour déterminer les plus-values taxables sera la suivante :

  • Détermination des plus-values avant abattement,
  • Imputation de 100 % des moins-values sur les plus-values réalisées,
  • Calcul d’une plus-value nette à laquelle s’appliquera l’abattement.

En d’autres termes, les moins-values sont redevenues totalement utilisables.

 

Sujet rédigé le 09 décembre 2015

Laurent PIERSON