L’administration abandonne la réponse BACQUET ?

Le ministre Michel Sapin vient d’annoncer que l’administration fiscale allait rapporter sa doctrine issue de la réponse ministérielle Bacquet. Cette doctrine concernait les contrats d’assurance-vie souscrits par des époux communs en biens.

La problématique concernait les contrats d’assurance-vie non dénoués au premier décès et alimentés avec des fonds communs. Le décès de l’époux bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie souscrit par son conjoint avec des fonds communs était jusqu’alors pris en compte pour sa valeur de rachat dans l’actif de communauté et soumis aux droits de succession dans les conditions de droit commun.

La réponse ministérielle Bacquet n’était qu’une stricte application des règles civiles, et impliquait donc les contrats non dénoués au décès du premier des époux mais également les contrats dénoués dès lors que le bénéficiaire du contrat n’était pas l’époux commun en biens. L’inconvénient principal de cette doctrine était de conduire à une augmentation de l’actif taxable du chef des enfants, alors même que ceux-ci ne bénéficiaient pas des fonds puisque le contrat restait ouvert au nom de l’époux survivant.

Dès lors, dans le cas d’un contrat d’assurance-vie souscrit par un époux au profit de son conjoint avec de l’argent commun, le contrat n’était pas dénoué et l’assureur ne versait rien. La valeur de rachat du contrat, au jour du décès, constituait juridiquement un bien commun prit en compte pour moitié dans la succession du conjoint décédé. Le même raisonnement valait pour un contrat dénoué, dès lors que le bénéficiaire était un étranger au conjoint commun.

Jusqu’à la réponse ministérielle Bacquet, les héritiers disposaient d’un choix entre intégrer la valeur de rachat dans l’actif de communauté ou, au contraire, la traiter comme un bien propre du survivant. C’est cette tolérance qu’avait rapportée la réponse ministérielle Bacquet.

L’inconvénient lié à cette doctrine fiscale était à relativiser. En effet, cela conduisait parfois à un surcoût au premier décès des héritiers autres que le conjoint. Mais très souvent ce surcoût était compensé par une moindre taxation au second décès. Parfois même, dans certaines situations particulières, l’application de cette doctrine fiscale entraînait une économie de droit.

Le ministre des Finances vient d’annoncer, par un communiqué de presse du 12 janvier, l’abandon de la réponse Bacquet. Dès lors, au plan fiscal, les droits de succession ne seront dus qu’au second décès. Il n’en demeure pas moins que le notaire aura sans doute une double liquidation à réaliser : l’une civile, afin de prendre en compte le caractère commun des fonds, l’autre fiscale. Ceci va encore complexifier la matière.

D’autant que la simple lecture du communiqué de presse est ambiguë. Seul un examen du BOFIP sera à même de confirmer cette synthèse.

Laurent PIERSON